Les conditions générales qui figurent au dos d’un facture émise par une entreprise sont-elles opposables à ses clients ?
En principe, pour avoir valeur contractuelle, les conditions générales doivent avoir été portées à la connaissance du cocontractant et avoir été acceptées par celui-ci au plus tard à la conclusion du contrat.
Or, en pratique, il arrive souvent que le seul document écrit entre deux parties à un contrat soit la facture émise par l’une d’entre elle après la réalisation de la prestation convenue.
Exemples:
- Lorsqu’un particulier fait appel à un plombier pour réparer une fuite, il n’y a généralement aucun contrat écrit signé par les parties avant la réalisation des travaux.
- Lors de l’achat d’un appareil électroménager dans un magasin spécialisé, la facture est généralement transmise au client après le paiement.
- Lorsqu’un restaurateur commande des produits chez un fournisseur, ou lorsqu’une entreprise distribue ses produits chez des commerçants, la seule trace écrite de la vente est généralement la facture du vendeur, émise après la livraison des produits.
Dans ce cas, les conditions générales apposées au dos d’une facture émise par une entreprise sont-elles toujours inopposables à son cocontractant ?
Pas nécessairement. Pour commencer, il y a lieu de distinguer la facture adressée à un client professionnel (relation B2B) de celle adressée à un consommateur (relation B2C).
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I. Relations B2B
L’article 8.11, §4, al. 1 du code civil prévoit que, sauf preuve contraire, une facture acceptée par une entreprise ou non contestée dans un délai raisonnable fait preuve contre l’entreprise de l’acte juridique allégué.
Pour autant que les conditions générales soient imprimées intégralement de manière lisible au dos de la facture, dans une langue compréhensible pour le destinataire, elles seront opposables au client professionnel qui ne conteste pas ladite facture.
Exception. La jurisprudence constante considère que la clause de choix de juridiction contenue dans les conditions générales au dos d’une facture n’est pas opposable au cocontractant, même lorsqu’il n’a pas contesté la facture.
Le règlement européen Bruxelles I bis requiert que la clause d’élection de for soit acceptée au plus tard au moment de la conclusion du contrat. Or, si la facture est transmise au client après la conclusion du contrat, elle ne constitue pas un accord valable.
Pour vous assurer de la validité de cette clause, nous vous conseillons de l’extraire des conditions générales et de la placer dans le contrat principal signé par les parties ou d’obtenir l’accord du cocontractant sur son contenu par email ou autre forme d’écrit.
Cette exception est nuancée dans le cadre des relations commerciales suivies entre entreprises. Il reviendra au tribunal compétent saisi d’un litige sur cette question de déterminer s’il y a accord des parties ou non, en fonction des circonstances de la cause.
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II. Relations B2C
L’article 8.11, §4, al. 2 du code civil prévoit qu’une facture non contestée par un particulier ne peut être considérée comme acceptée, sauf si cette absence de contestation constitue un silence circonstancié. Lorsque la facture est acceptée, expressément ou tacitement, elle constitue seulement une présomption de fait.
Les conditions générales reprises au dos d’une facture envoyée à un consommateur ne sont donc pas suffisantes. Même s’il accepte la facture concernée, le consommateur n’est que présumé avoir accepté les conditions générales.
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III. Bonnes pratiques
Si vos clients sont des consommateurs, faites toujours lire et signer vos conditions générales avant la conclusion du contrat. A défaut, vous ne pourrez être certain de les lui opposer en cas de litige.
Si vos clients sont des professionnels, pour assurer au maximum l’opposabilité des conditions générales reprises au dos de vos factures :
- Vos conditions générales doivent être reprises en intégralité sur le document. Ne vous contentez pas de mentionner qu’elles sont disponibles sur demande ou de renvoyer vers une page internet.
. - Rédigez votre document de façon claire et compréhensible, dans une langue comprise par votre client.
. - Utilisez une police lisible, de taille et de couleur appropriée.
. - Mentionnez au recto de la facture que les conditions générales applicables au contrat se trouvent au verso du document.
. - Précisez au recto de la facture qu’en acceptant cette facture ou en s’abstenant de la contester dans un délai raisonnable, le client sera lié par les conditions générales au verso.